À l’occasion de la participation de la CFTC, via Denis Jeambrun, à un groupe de travail du Comité Economique et Social européen, pour un avis sur le futur « Space Act » européen, la CFTC a évoqué le lien entre la structure des lois européennes et le développement industriel, dont l’emploi.
Le domaine spatial est tout aussi stratégique qu’emblématique. Stratégique, car les clients sont essentiellement étatiques. Emblématique, notamment, par l’argent public dépensé pour innover et développer des industries de pointe et des emplois de qualité. Or, la règle d’achat européenne consiste en la compétition des fournisseurs. À la compétition des entreprises européennes entre elles, s’ajoute donc aussi la mise en concurrence avec d’autres entreprises extraeuropéennes. Ces autres ont des structures de coûts notablement différents (sans obligations de respect des normes sociales ou environnementales européennes, notamment). La distorsion de concurrence et la concurrence intraeuropéenne freinent, voire empêche, tout développement efficace de notre industrie. De plus, ceci introduit un biais défavorable sur le bon usage du denier public, c’est-à-dire de l’impôt des travailleurs européens, alimentant le développement extraeuropéen, au détriment du PIB européen. Soit, un double appauvrissement des travailleurs, tant par la perte d’emplois que part le prélèvement et « l’exportation » d’argent public.
Il y a malheureusement des précédents. Un exemple emblématique concerne les avions de chasses. Ils sont de trois types similaires en Europe (ce qui n’existe sur nul autre continent) : le Rafale, le Gripen et l’Eurofighter. Malgré cela, et avec le système d’appel d’offres dans un marché international, la plupart des pays européens ont acheté des chasseurs américains plutôt qu’européens. Ceci au détriment des emplois et deniers communautaires. Et, au détriment même de la souveraineté (un avion américain ne peut voler que si les USA l’accordent). Soit, une Europe perdante sur tous les tableaux. En l’état, il y a tout lieu de croire qu’il en sera de même pour le spatial. D’autant que l’Europe a déjà pris beaucoup de retard, non seulement sur l’Amérique, mais aussi sur la Chine.
Ainsi, plutôt que de multiplier les concurrents internes, il serait plus efficace de favoriser l’émergence d’un champion européen. Cela s’est déjà fait une fois, et une seule, en Europe : Airbus. Jusque là, cela fonctionne plutôt bien. Ainsi, pour la partie française, encouragée par la Commission et avec le support de nos collègues européens, la CFTC a porté une modification du texte de l’avis des restrictions d’accès (notamment, par réciprocité, vis-à-vis des pays « protectionnistes » ne nous ouvrant pas leur marché spatial) et pour favoriser, voire conforter, l’émergence de « champions » européens, plutôt que de fragmenter davantage notre industrie. L’industrie spatiale française devrait être ainsi en bonne position pour continuer à s’imposer comme leader européen et créer des emplois passionnants et bien rémunérés.